Dans un contexte où le gouvernement cherche à lancer une nouvelle étape de réforme de l’Assurance chômage, les tensions entre l’exécutif et les syndicats se sont accentuées. Après trois réformes successives depuis 2019, ayant significativement réduit les droits des demandeurs d’emploi, la montée au créneau de Force Ouvrière (FO) marque un tournant. Le syndicat refuse catégoriquement toute nouvelle modification qui, selon lui, fragiliserait davantage le système de protection sociale. Alors que l’Unédic prévoit un déficit pour 2025 et 2026 lié aux prélèvements étatiques, la question se pose de savoir si la sécurité sociale peut encore subir des coupes budgétaires sans compromettre ses missions fondamentales d’indemnisation et d’accompagnement de l’emploi. Ce débat s’inscrit dans un paysage social tendu, où le dialogue entre partenaires sociaux se fait plus difficile, et où l’avenir de la protection chômage est plus incertain que jamais.
La volonté de FO de préserver les droits des demandeurs d’emploi face aux réformes successives de l’Assurance chômage
Depuis 2019, le régime de l’Assurance chômage a connu un bouleversement profond. Trois réformes majeures ont modifié l’accès aux droits et les conditions d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Force Ouvrière s’oppose frontalement à toute nouvelle réforme qui prolongerait cette tendance, dégradant toujours davantage la protection sociale des salariés en recherche d’emploi.
Parmi les changements les plus marquants, la durée minimale de cotisation nécessaire pour bénéficier des allocations chômage a été augmentée, passant de quatre mois à six mois sur une période de vingt-quatre mois. Cette mesure vise à réduire le nombre de bénéficiaires, mais pose la question de l’équité, notamment pour les travailleurs précaires ou ayant des contrats courts. Par ailleurs, la durée maximale d’indemnisation a été réduite de 24 à 18 mois, ce qui limite significativement la période pendant laquelle un demandeur d’emploi peut recevoir un soutien financier.
La modification du mode de calcul du salaire journalier de référence (SJR) a également conduit à une baisse moyenne de 18 % de l’allocation journalière. Cette réduction impacte évidemment le pouvoir d’achat des chômeurs. Enfin, l’âge à partir duquel les seniors bénéficient d’une durée d’indemnisation plus longue a été relevé, passant de 53 à 55 ans. Cela ralentit l’accès à une indemnisation prolongée pour cette catégorie de travailleurs, souvent plus vulnérables face au marché de l’emploi.
Force Ouvrière estime que ces mesures, accumulées, ont considérablement affaibli la fonction sociale de l’Assurance chômage, en réduisant tant la portée que la qualité de l’indemnisation. La confédération insiste sur le fait que seuls 40 % des demandeurs d’emploi sont aujourd’hui indemnisés, et que parmi eux, environ 50 % exercent une activité professionnelle. Autrement dit, une grande partie de la population en recherche d’emploi ne bénéficie plus d’aucune protection viable. Avec un montant moyen d’allocation mensuelle nette fixé à 1 031 euros, beaucoup peinent à subvenir à leurs besoins.
- Durée minimale de cotisation passée de 4 à 6 mois;
- Réduction de la durée maximale d’indemnisation de 24 à 18 mois;
- Baisse moyenne de 18 % des allocations due au recalcul du SJR;
- Relèvement de l’âge seuil pour seniors bénéficiaires d’indemnisation prolongée de 53 à 55 ans;
- Seuls 40 % des demandeurs d’emploi indemnisés;
- Montant moyen d’allocation : 1 031 euros par mois.
| Critère | Situation avant 2019 | Situation depuis les réformes |
|---|---|---|
| Durée minimale de cotisation | 4 mois | 6 mois |
| Durée maximale d’indemnisation | 24 mois | 18 mois |
| Âge pour senior | 53 ans | 55 ans |
| Allocation moyenne mensuelle | Non précisé | 1 031 euros |
La position de FO s’appuie aussi sur une analyse juridique : la confédération a saisi le Conseil d’État en septembre 2025 contre la lettre de cadrage émise par le Premier ministre de l’époque, François Bayrou. FO conteste la légalité de cette lettre qui encadre la négociation de la convention d’assurance chômage, estimant qu’elle impose des contraintes budgétaires excessives aux partenaires sociaux et remet en cause le droit du travail au détriment des salariés.
La dégradation financière de l’Assurance chômage et ses implications sur la protection sociale
Les difficultés financières du régime d’Assurance chômage s’amplifient. Selon les dernières projections de l’Unédic, des déficits seraient enregistrés en 2025 et 2026. Cette situation s’explique en grande partie par les prélèvements importants réalisés de manière unilatérale par l’État. Entre 2023 et 2026, environ 12 milliards d’euros ont été prélevés sur les fonds destinés à l’assurance chômage.
Ce transfert de fonds, bien qu’inscrit dans une logique de réduction des déficits publics, soulève une double problématique :
- Il empêche le régime de se désendetter, mettant en péril sa capacité à remplir sa mission de stabilisateur économique et social en période de crise ;
- Il accentue les tensions sur la pérennité de la protection sociale liée à l’emploi, fragilisant implicitement la sécurité des travailleurs et des demandeurs d’emploi.
Une des fonctions essentielles de l’Assurance chômage est son rôle contracyclique. En effet, en période de crise économique, elle intervient pour amortir la baisse d’activité en soutenant financièrement ceux qui perdent leur emploi. Or, la réduction des ressources, combinée à un durcissement législatif des conditions d’indemnisation, remet en cause cette opération sociale simple mais cruciale.
Cette érosion des ressources a aussi des répercussions pratiques : les organismes gestionnaires doivent parfois restreindre leurs services ou adapter leurs modalités d’accompagnement, ce qui complique le retour à l’emploi des chômeurs. Le financement précaire pèse également sur la qualité des dispositifs d’aide à la recherche d’emploi ou de formation professionnelle.
| Année | Prélèvements étatiques (en milliards d’euros) | Prévisions déficit Unédic (en milliards d’euros) |
|---|---|---|
| 2023 | 3 | 0,5 |
| 2024 | 3 | 0,8 |
| 2025 | 3 | 1,2 |
| 2026 | 3 | 1,5 |
Cette situation de déficit financier contribue à rendre le débat autour d’une nouvelle réforme très sensible. Le gouvernement cherche à réaliser des économies supplémentaires sur le budget de l’Assurance chômage, ce qui est perçu comme une tentative de fragiliser davantage le système par certains syndicats.
Les conséquences sur l’emploi et la sécurité sociale
Un régime d’Assurance chômage affaibli engendre des répercussions sur le marché de l’emploi dans son ensemble :
- Moins d’indemnisation signifie une perte de pouvoir d’achat pour les allocataires, ce qui freine la consommation et ralentit ainsi la dynamique économique ;
- Un accompagnement moins performant des demandeurs d’emploi peut allonger leur période sans activité professionnelle ;
- Une protection sociale affaiblie réduit la confiance des travailleurs dans le système, avec un impact négatif sur le climat social et le droit du travail.
Les arguments politiques et sociaux en opposition à toute nouvelle réforme de l’Assurance chômage
La fermeté affichée par FO s’inscrit dans un rejet plus large des politiques publiques qui cherchent à restreindre les protections sociales. Pour le syndicat, toute réduction supplémentaire des droits à l’assurance chômage se fait aux dépens des travailleurs les plus vulnérables et aggrave les inégalités sociales.
La légitimité de la réforme est aussi remise en cause dans l’opinion publique, en particulier auprès des demandeurs d’emploi qui se sentent déjà exclus du dispositif. Les mesures prises depuis 2019 ont creusé le fossé entre les bénéficiaires et ceux qui n’ont aucun accès à l’indemnisation. Cette fracture sociale est un facteur d’instabilité potentielle.
- Remise en question du respect des principes de solidarité et de justice sociale ;
- Risque de marginalisation des publics en fragilité économique ;
- Pression accrue sur les autres dispositifs sociaux (RSA, aide au logement) ;
- Amplification des tensions dans le dialogue social et le débat politique.
Les syndicats comme FO rappellent également le caractère essentiel de la négociation collective dans la construction des règles d’indemnisation. Selon eux, les orientations budgétaires trop strictes imposées le plus souvent par l’exécutif nuisent à l’équilibre entre protection sociale, droits des travailleurs, et gestion financière.
Les perspectives et enjeux pour le futur de l’Assurance chômage en France
Alors que le gouvernement envisageait de lancer une nouvelle réforme sous le Premier ministre Sébastien Lecornu, reconduit en octobre, les positions de FO compliquent la mise en œuvre de cette réforme. Cette nouvelle étape de réforme serait la quatrième depuis 2019, renforçant une tendance lourde qui a vu la réduction systématique des droits et protections attachées à l’assurance chômage.
Pour FO, l’enjeu dépasse la simple question financière : il s’agit de préserver un système de protection sociale viable, capable d’accompagner efficacement les travailleurs dans leur parcours professionnel et dans la sécurisation de leur emploi. La confédération plaide en faveur d’un renforcement des droits, d’une amélioration des dispositifs d’accompagnement, et d’un financement pérenne de l’assurance chômage, condition nécessaire à sa fonction contracyclique et solidaire.
- Maintien des droits actuels sans nouvelle restriction;
- Révision favorable du calcul des allocations pour compenser les pertes dues au nouveau mode de calcul;
- Renforcement de l’accompagnement vers l’emploi et la formation professionnelle;
- Recherche de financements alternatifs pour limiter les prélèvements de l’État;
- Dialogue social revitalisé, avec un poids renforcé des syndicats dans la négociation.
Le débat reste ouvert, et la capacité des partenaires sociaux à trouver un compromis déterminera la solidité du régime dans les années à venir. En attendant, FO maintient une position inflexible, estimant que toute nouvelle réforme serait contraire aux intérêts des travailleurs et du droit du travail.
Les alternatives et propositions de FO pour un système d’Assurance chômage plus juste et viable
Face à la menace de nouvelles restrictions, FO avance des propositions concrètes visant à améliorer la pérennité financière de l’Assurance chômage sans réduire les droits des salariés. Le syndicat insiste sur la nécessité de réformes structurelles et non sur des coupes budgétaires unilatérales.
Les propositions comprennent notamment :
- La revalorisation du salaire journalier de référence pour rétablir un niveau décent des allocations ;
- Un retour sur la durée minimale de cotisation, en tenant compte des réalités du marché de l’emploi et des parcours atypiques ;
- La mise en œuvre d’un financement via une cotisation sociale élargie et mieux répartie entre employeurs et salariés ;
- Un renforcement des dispositifs d’accompagnement à l’emploi, avec un focus sur la formation professionnelle et l’insertion durable ;
- Un engagement à lutter contre la précarité et le travail dissimulé, afin de garantir la solidarité entre tous les actifs.
Ces propositions traduisent une vision d’un système d’Assurance chômage qui reste protecteur, solidaire et adapté aux mutations du marché du travail. Elles contrastent avec les mesures restrictives envisagées par le gouvernement et symbolisent le refus de la casse du droit du travail par FO.
| Proposition | Objectif | Impact attendu |
|---|---|---|
| Revalorisation du SJR | Maintenir le niveau des allocations | Conserver le pouvoir d’achat des demandeurs d’emploi |
| Allègement de la durée de cotisation | Faciliter l’accès au chômage | Plus de bénéficiaires et meilleure couverture sociale |
| Élargissement des cotisations sociales | Assurer un financement pérenne | Stabilité financière et capacité d’amortisseur social |
| Renforcement de l’accompagnement | Faciliter le retour à l’emploi | Moins de chômage de longue durée |
| Lutte contre la précarité | Garantir la solidarité | Protection sociale renforcée |
L’action de FO se démarque par sa combativité et sa détermination à empêcher un nouvel affaiblissement du régime d’Assurance chômage. Le dialogue social demeure un enjeu majeur, mais la mobilisation syndicale pèse de plus en plus lourd face aux projets gouvernementaux.
Questions fréquentes sur la réforme de l’Assurance chômage et la position de FO
-
Pourquoi FO refuse-t-elle toute nouvelle réforme de l’Assurance chômage ?
Parce que FO considère que les réformes précédentes ont déjà réduit considérablement les droits des demandeurs d’emploi et que toute nouvelle mesure risquerait de fragiliser le système social et économique actuellement en place. -
Quel est l’impact des réformes de 2019 à aujourd’hui sur les indemnités chômage ?
Les réformes ont allongé la durée de cotisation nécessaire, réduit la durée maximale d’indemnisation, abaissé le montant moyen des allocations et relevé l’âge pour les seniors, ce qui a réduit le nombre de bénéficiaires et le niveau des prestations. -
Comment l’assurance chômage est-elle financée et pourquoi est-elle en déficit ?
Elle est financée par des cotisations sociales prélevées sur les salaires, mais subit des prélèvements étatiques importants qui fragilisent ses ressources et la mettent en situation de déficit, particulièrement prévu pour 2025-2026. -
Quelles alternatives FO propose-t-elle aux réductions budgétaires ?
FO propose de revaloriser le salaire journalier de référence, d’alléger la durée minimale de cotisation, d’élargir les cotisations sociales, de renforcer l’accompagnement à l’emploi, et de lutter contre la précarité. -
Quel est le rôle de l’Unédic dans ce contexte ?
L’Unédic est l’organisme paritaire chargé de la gestion de l’Assurance chômage. Elle prévoit les déficits et guide les négociations avec les partenaires sociaux pour ajuster les règles d’indemnisation dans un cadre souvent contraint.